Questions aux régisseurs

Musée Unterlinden

Place Unterlinden
68000 COLMAR

info@musee-unterlinden.com

+33(0)3 89 20 15 50

Horaires d’ouverture

Mercredi au lundi : 9h —18h
Fermé le mardi

1.1, 1.5, 1.11, 25.12 : fermé
24.12 et 31.12 : 9h —16h

 

Questions aux régisseurs des œuvres d’art du Musée Unterlinden, Emma Delgado et Vincent Husser

  1. Dans quel contexte avez-vous recours à la mise en quarantaine des œuvres ?

Depuis 2015 et les travaux d’extension, le Musée Unterlinden dispose d’un espace de quarantaine de 30m² bénéficiant d’un climat contrôlé. La quarantaine est un outil de la politique de conservation préventive d’un musée qui consiste à prévenir tout risque de dégradation des œuvres. Les agents spécialisés en conservation préventive sont aussi appelés préventeurs.

Dans l’idéal, toute œuvre entrant au musée doit être placée en isolement au moins un mois sous surveillance afin de s’assurer qu’elle ne représente pas un danger pour les autres collections.

En effet, les œuvres composées de matériaux organiques peuvent être infectées ou infestées par des organismes vivants. Certains papiers, bois, par exemple, attirent des insectes qui s’en nourrissent. C’est le cas, entre autres (termites, capricornes…), de la vrillette (petite ou grosse), insecte bien connu des préventeurs, qui vient pondre ses œufs dans les cavités du bois. Les larves de la vrillette sont en effet xylophages. Elles grignotent les fibres du bois sous sa surface en formant des galeries, souvent invisibles de l’extérieur, et ce, pendant parfois des années. Au moment propice, les larves se transforment en insectes adultes par nymphose : elles prennent leur envol d’avril à août pour se reproduire et créent alors ce qu’on appelle « un trou d’envol ». Ce sont les fameux petits trous que l’on peut voir à la surface des bois attaqués. La chute de vermoulure fraîche peut indiquer la présence de ces insectes. C’est pourquoi, il est très important de bien observer les œuvres quand elles viennent d’être acquises ou quand elles reviennent d’espaces extérieurs ou de prêts afin de ne pas contaminer d’autres œuvres saines.

La quarantaine est une salle d’observation et non de traitement. Aussi, si l’infection ou l’infestation est confirmée, l’œuvre est ensuite confiée aux soins d’un restaurateur qui délivrera le traitement adapté.

 

  1. Comment procédez-vous pour mettre une œuvre en quarantaine ?

 

La quarantaine est une pièce isolée des réserves et autres lieux contenant des œuvres avec un accès dédié. Elle est équipée de différents mobiliers prêts à recevoir tous types d’œuvres (grilles pour les peintures ; étagères, racks pour les objets en 3D).

Quand une œuvre arrive de l’extérieur au musée, elle est emballée. Le risque qu’elle comporte est donc contenu. Elle est déballée à l’intérieur de la quarantaine et un examen, qu’on appelle constat d’état est effectué. Il consiste à observer l’intégralité de l’état de l’œuvre à la fois matériel et sanitaire afin de noter toutes les dégradations qu’elle a subies, une sorte d’état des lieux en somme. À partir de cet examen et en fonction des matériaux constitutifs de l’œuvre, le préventeur sait déjà à quoi s’attendre au niveau des risques, notamment en fonction des indices qu’il a pu relever. Si d’autres œuvres sont présentes dans la quarantaine au même moment, il va les mettre à distance et éventuellement former des bulles plastifiées autour pour éviter les contaminations. Il peut aussi créer des séparations avec des cloisons temporaires ou des bâches.

 

  1. Quel est le protocole de surveillance de l’œuvre pendant cette période ?

 

Toutes les semaines le préventeur va venir observer et consigner les changements, comparer avec son examen de départ et les photos qu’il a prises. A l’aide d’une lampe, il va regarder dans les moindres recoins accessibles de l’œuvre, ainsi qu’autour d’elle également car de la vermoulure, des insectes morts peuvent en tomber et donner la preuve d’une infestation ancienne ou en cours. Si la quarantaine dispose de pièges à insectes, ceux-ci vont être vérifiés. Des changements de couleur, taches, pulvérulences peuvent indiquer une infection, c’est-à-dire la présence de micro-organismes, champignons, algues ou une dégradation du matériau (corrosion ou instabilité). L’historique de la vie de l’œuvre est aussi intéressant à connaître car, si elle a subi un dégât des eaux par exemple, les risques liés au développement de micro-organismes seront plus élevés.

  1. Est-ce que la durée de la mise en quarantaine correspond à 40 jours ?

 

Non, pas forcément, la durée d’observation peut varier en fonction des suspicions ou des changements détectés. Si l’œuvre comporte peu de risque de contamination, comme une sculpture métallique, il n’y aura pas de raison de faire durer la quarantaine. En revanche, si l’œuvre est composée de matériaux organiques et, qu’en plus de ce facteur, on remarque des indices laissant supposer sa contamination, on peut la garder sous surveillance plus que 40 jours. Dans un cas comme une suspicion d’infestation par des insectes xylophages qui ne pourrait pas être levée par l’observation en quarantaine, on appliquera, par mesure de précaution, un traitement insecticide (par voie liquide, anoxie ou congélation). L’avis de spécialistes (entomologistes, restaurateurs) peut être toutefois important à requérir en amont pour éviter des manipulations et traitements inutiles.

  1. A la fin de la quarantaine, l’œuvre peut-elle intégrer les collections du musée ?

 

À la fin de la quarantaine, si l’œuvre, de façon certaine, ne présente pas de risque, elle intègre ou réintègre en effet les autres collections, soit dans les réserves, soit dans les salles d’exposition. Avant cela, elle peut faire l’objet d’un dépoussiérage qui permettra de l’assainir complètement afin qu’elle ne constitue pas un foyer potentiel d’infection avec les spores et micro-organismes présents dans la poussière.

 

 

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