Nouvelle acquisition : Jouée de stalles

Musée Unterlinden

Place Unterlinden
68000 COLMAR

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+33(0)3 89 20 15 50

Horaires d’ouverture

Mercredi au lundi : 9h —18h
Fermé le mardi

1.1, 1.5, 1.11, 25.12 : fermé
24.12 et 31.12 : 9h —16h

 

La nouvelle acquisition de la Jouée de stalles (atelier bâlois, 1493) provenant de l’église de la commanderie des Antonins d’Issenheim (Alsace), sera présentée dans la salle consacrée à l’art médiéval bâlois et souabe au rez-de-chaussée du Cloître du musée à partir du 18 janvier 2023.

Contexte

Cette sculpture provient de la commanderie des Antonins d’Issenheim (Alsace). C’est un élément des stalles des chanoines de l’église de la commanderie d’Issenheim. Ces stalles sont décrites en 1628 (Archives départementales ADMM H 1788) : « en 1493, Guers a fait faire dans le choeur des stalles d’un travail remarquable, au nombre de 54, ornées de 50 figures et de plus de cent bustes ». Le même ensemble fait l’émerveillement d’un vicaire de l’abbé général chargé de visiter les maisons de l’Ordre antonin. Il arrive le 25 septembre 1650 et précise : « Le choeur est tout entier travaillé à jour, avec des petites figures d’une menuiserie approchant de celle des Dominicains de Troyes ». Enfin l’Inventaire estimatif rédigé le 4 février 1793 par Louis Vaillant et Louis Homburger mentionne : « Nous observons qu’il règne tout autour du choeur une boiserie moderne en panneaux de bois de chêne, mais que les stalles qui sont aussi en chêne sont d’une structure antique ». (ADHR L 608 1 Q boite 172). Les stalles au même titre que l’orfèvrerie, les objets liturgiques, la grille du choeur ont sans doute étaient vendues peu après leurs estimations (les retables, panneaux peints et sculptures dignes de l’intérêt des commissaires de la république sont transférés au musée de Colmar). De la fin du 18e siècle à la collection de Madame D. mise en vente à Paris le 1er avril 2022, l’histoire de cette oeuvre nous est inconnue à ce jour.

Description

Ce relief en chêne est le registre supérieur d’une jouée de stalles. Il est conservé en réserves suite à son acquisition.
Le vieillard en prière, tenant entre ses mains jointes un chapelet et vêtu de feuillages est saint Onuphre, anachorète de la Thébaïde au IVe siècle. Ce saint priant dans le désert égyptien, comme son prédécesseur saint Paul l’ermite, se distingue de ce dernier, soit par son absence de vêtement où seuls ses poils ou sa chevelure et sa barbe cachent sa nudité, soit par un vêtement de feuillages (Gravure d’Albrecht Dürer, Saint Jean Baptiste et saint Onuphre, 1503, Bristih Museum ou Retable de Bergheim sculpté par Veit Wagner vers 1515, Musée Unterlinden, détail du relief avec Saint Onuphre).
La présence de saint Onuphre, associé à de très nombreux autres saints et saintes, s’inscrit parfaitement dans le programme iconographique des stalles réalisées pour l’église de la commanderie des Antonins d’Issenheim dont le saint patron a lui aussi vécu dans le désert égyptien.
En outre l’étude matérielle, formelle et stylistique prouvent que cet élément faisait bien partie des stalles des religieux de la commanderie d’Issenheim dont plusieurs éléments, datées de 1493 sont conservés au Musée Unterlinden.
Les dimensions (approximatives données dans le catalogue, 131 x 36,5 cm) de ce fragment de jouée en chêne, découpée dans sa partie inférieure et dans sa largeur correspondent aux dimensions des registres supérieurs des deux jouées en chêne conservées au musée Unterlinden : approximativement 127 x 41 cm. Sont représentés Saint Jérôme et Sainte Catherine, et sur la seconde, Saint Augustin et Sainte Barbe. Les sculptures des deux saints des registres supérieurs, sculptées au revers, sont positionnées, comme le Saint Onuphre, entre deux colonnes torses sous un arc de rinceaux ouvragés. Le traitement des rinceaux ajourés est strictement le même que celui visible sur un élément des stalles d’Issenheim conservé au Musée Unterlinden : les tiges se terminent en palmettes aux multiples petits lobes.
L’aspect hiératique de Saint Onuphre, pas seulement lié à sa fonction, les mains surdimensionnées, le visage aux joues creusées, les sillons descendant sous les yeux, les pattes d’oies et les lignes de rides sur le front sont autant de motifs formels qui se retrouvent sur les autres sculptures des stalles conservées au Musée Unterlinden. Les différences de traitement et de qualité entre les figures s’expliquent par les diverses mains oeuvrant dans cet atelier très certainement bâlois.
La sculpture bâloise a été étudiée dès le début des années 1950 par Annie Kaufmann Hagenbach (Die Basler Plastik des fünfzehnten und frühen sechzehnten Jahrunderts, éd. Birkhäuser, Bâle, 1952). Autour de 1500, quatre ateliers sont identifiés à Bâle : celui du Maître de Saint Laurent identifié à Heinrich Isenhut, Jos et Domenicus Guntersumer, Martin Lebzelter et Martin Hoffmann. Le sud de l’Alsace dépendant du diocèse de Bâle, beaucoup de sculptures de Haute Alsace proviennent d’ateliers bâlois. Guy Guers, qui vient d’être nommé précepteur de la commanderie des Antonins d’Issenheim y commande ces stalles datées 1493. Il est encore prématuré d’attribuer les stalles à un atelier précis.
Cette acquisition, rendue possible grâce à la perspicacité de Damien Berné, conservateur en chef au Musée de Cluny, qui a repéré l’oeuvre, permettra de relancer le travail de recherche autour de cet ensemble provenant du site le plus connu d’Alsace grâce au Retable réalisé par Grünewald et Nicolas de Haguenau.
Les éléments de stalles d’Issenheim actuellement dans les collections du Musée ont été données entre 1855 et 1858 par l’artiste colmarien Gustave Saltzmann (1811-1872).
Cette acquisition ajoute un élément aux reliefs et jouées des stalles d’Issenheim déjà conservés au musée, et sa redécouverte permet d’imaginer que d’autres éléments de ces stalles existent encore après leur dispersion à la Révolution française.

Pantxika De Paepe
Ancienne Directrice et conservatrice en chef du Musée Unterlinden

Vous souhaitez en savoir plus ? Consultez la fiche consacrée à la jouée de stalles dans notre rubrique oeuvre

 

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